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Activité 1 : mise en contexte précédant la lecture du roman (75 minutes)

 

La première activité proposée aux élèves est une introduction à la séquence didactique qui les familiarisa au romantisme et au contexte historique de production de l’œuvre. Cette activité de début de séquence servira à faire découvrir les thèmes du courant romantique à partir d’autres œuvres du même courant, comme une toile de Caspar David Friedrich, un extrait du poème Les Révolutions d’Alphonse de Lamartine et un extrait du livre Les Misérables de Victor Hugo.

 

L’abbaye dans une forêt de chênes (annexe 1) est une toile romantique réalisée par Caspar David Friedrich en 1809-1810. Sur cette œuvre, nous pouvons facilement déceler le thème de la mort. En effet, il est visible d’abord dans la mort des arbres et de la végétation au sol, puis par la présence d’une tombe et de croix. La noirceur du tableau évoque des sentiments sombres comme l’inquiétude et la peur, bref, des sentiments associés au mal du siècle (concept qui sera expliqué aux élèves). Finalement, le contraste entre l’obscurité et la lumière illustre bien l’antithèse entre les bons et les mauvais côtés de l’humanité, qui est au cœur du courant romantique. C’est avec cette œuvre que l’entrée en matière du courant étudié sera faite. L’enseignant invitera les élèves à discuter en équipe à partir des questions suivantes : qu’est-ce que tu vois sur cette toile ? À quoi te fait-elle penser, que t’évoque-t-elle ? Quels thèmes peux-tu en dégager ? Ces questions permettront aux élèves de comprendre les thèmes susmentionnés.

 

L'abbaye dans une forêt de chênes, huile sur toile, Caspar David Friedrich, 1809-1810

Puis, nous proposons de travailler un extrait du roman Les Misérables (annexe 2) de Victor Hugo, paru en 1862. Cette œuvre phare de la littérature française serait le premier contact entre les élèves et l’auteur. De plus, cette approche permettra aux élèves de découvrir le style engagé et imagé de Hugo et, par le fait même, le sujet du roman à l’étude : la peine de mort. Dans l’extrait choisi, l’auteur traite de la guillotine. Il n’hésite pas à exprimer son dégout quant à cette dernière. Par exemple, il déplore la violence de cet objet (« un choc », « si l’on en rencontre une, la secousse est violente ») et la compare à un « monstre fabriqué par le juge et par le charpentier » duquel les condamnés ont peur (« hallucine », « frissonne du plus mystérieux des frissons »). Bref, l’extrait est rempli d’images violentes et cruelles pour décrire la guillotine. Le vocabulaire connoté utilisé par l’auteur est un signe de son engagement. Afin que les élèves constatent cet engagement, ils liront l’extrait et discuteront à propos des questions suivantes : quelle sanction pénale l’auteur décrit-il dans cet extrait ? Quelles images vous viennent en tête à la lecture ? Quelle est la position de Hugo à ce sujet ? Qu’est-ce qui te le fait dire ? Quels types de mots et d’expressions utilise-t-il ? Si nécessaire, l’enseignant donnera des détails sur les mots « Maistre » et « Beccaria » pour mieux les faire comprendre.

« [...] avoir vu la guillotine fut pour lui un choc et il fut longtemps à s’en remettre. L’échafaud, en effet, quand il est là, dressé et debout, a quelque chose qui hallucine. On peut avoir une certaine indifférence sur la peine de mort, ne point se prononcer, dire oui et non, tant qu’on n’a pas vu de ses yeux une guillotine ; mais, si l’on en rencontre une, la secousse est violente, il faut se décider et prendre parti pour ou contre. Les uns admirent, comme de Maistre ; les autres exècrent, comme Beccaria. La guillotine est la concrétion de la loi ; elle se nomme vindicte ; elle n’est pas neutre. Qui l’aperçoit frissonne du plus mystérieux des frissons. Toutes les questions sociales dressent autour de ce couperet leur point d’interrogation. L’échafaud n’est pas une charpente, l’échafaud n’est pas une machine, l’échafaud n’est pas une mécanique inerte faite de bois, de fer et de cordes. Il semble que ce soit une sorte qui a je ne sais quelle sombre initiative ; on dirait que cette charpente voit, que cette machine entend, que cette mécanique comprend, que ce bois, ce fer et ces cordes veulent. Dans la rêverie affreuse où sa présence jette l’âme, l’échafaud apparaît terrible et se mêlant de ce qu’il fait. L’échafaud est le complice du bourreau ; il dévore ; il mange de la chair, il boit du sang. L’échafaud est une sorte de monstre fabriqué par le juge et par le charpentier, un spectre qui semble vivre d’une espèce de vie épouvantable faite de toute la mort qu’il a donnée. »

 

Extrait des Misérables : Hugo, V. (2014). Les Misérables (Les cinq tomes). France : Arvensa éditions, 900 p.

Enfin, le maitre entamera le troisième volet de l’activité en lisant aux élèves un extrait des Révolutions (annexe 3) de Lamartine dans lequel on retrouve le même contraste de noirceur et de clarté que celui étudié dans la toile de Friedrich ainsi que le thème de l’engagement social étudié dans l’extrait des Misérables. L’enseignant fera la lecture du poème pour permettre aux élèves de prendre connaissance de la sonorité de ce dernier et peut-être ainsi évoquer des sentiments ou provoquer des images. À titre d’exemple, les vers « Hommes pétrifiés dans votre orgueil timide » et le son en [p] créent un sentiment de peur dans le texte. Le passage « Vous poussez dans le roc vos stériles racines », les sons en [g], en [r] et en [k] ainsi que le pronom « vous » et le déterminant « vos » présents dans le poème accentuent le sentiment de colère du narrateur engagé, un sentiment créé par le peuple qui dénie. En outre, le vers « Ce qui fut glace et nuit devient flamme et lumière » est un exemple pour illustrer le contraste entre la noirceur et la lumière dont on traite souvent dans le romantisme. Afin de ne pas clore le sens du texte et de laisser une place centrale à l’interprétation et à la réaction, l’enseignant questionnera les élèves de façon plus générale : quels vers sont les plus porteurs de sens pour toi ? Quels sentiments peux-tu dégager des vers ? Explique ces sentiments. Est-ce que ces vers créent une forte image dans ta tête ? Est-ce que les sons créent une musique ou un effet particulier chez toi ? Comment ? Bref, l’analyse de ces trois œuvres permettra aux élèves de bien situer le courant romantique dans lequel s’inscrit le roman de notre séquence didactique : Le Dernier Jour d’un condamné

[...]

Mais vous, peuples assis de l'Occident stupide,

Hommes pétrifiés dans votre orgueil timide,

Partout où le hasard sème vos tourbillons

Vous germez comme un gland sur vos sombres collines,

Vous poussez dans le roc vos stériles racines,

Vous végétez sur vos sillons !

[...]

Et rien ne redescend à sa forme première

Ce qui fut glace et nuit devient flamme et lumière;

Dans les flancs du rocher le métal devient or;

En perle au fond des mers le lit des flots se change;

L'éther en s'allumant devient astre, et la fange

Devient homme, et fermente encor !

 

Puis un souffle d'en haut se lève; et toute chose

Change, tombe, périt, fuit, meurt, se décompose,

Comme au coup de sifflet des décorations;

Jéhovah d'un regard lève et brise sa tente,

Et les camps des soleils suspendent dans l'attente

Leurs saintes évolutions.

[...]

 

Extrait du poème Les Révolutions, Alphonse de Lamartine.

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